Hashtag SCMR

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Réduction des Risques

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Lors du débat de la future loi santé début 2015, le législateur devrait (enfin) autoriser, à titre expérimental et sur une période de six ans, les Centres d’Accueil et d’Accompagnement à la Réduction de risques pour Usagers de Drogues (CAARUD), à mettre en place des Salles de Consommation à Moindre Risque (SCMR).
Depuis cinq ans, cette question alimente le débat public et médiatique avec des prises de position parfois contradictoires, parfois indignes voir mensongères de certains hommes/femmes politiques, de leurs « experts » et de certains acteurs impliqués dans les politiques de santé publique. Pourtant ce sont bien les acteurs de terrain, les professionnels du champ des addictions, ceux qui chaque jour sont en contact avec la précarité et les consommateurs de drogues, qui rèclament la mise en place de ce dispositif.
Face à la réalité du terrain et à la multitude de publications scientifiques (et littérature grise) démontrant l’efficacité de la politique de réduction des risques et des dommages ainsi que du dispositif SCMR, les opposants avancent des arguments tirés de rapports publiés par les associations ‘Drug Free Australia’ et ‘Drug Prevention Network of Canada’, membres de la ‘World Federation Against Drugs’ comme l’association Parents contre la drogues et clairement opposées aux politiques de réduction des risques et des dommages. Malheuresement, ces arguments sont régulièrement repris entre autres par l’Académie nationale de médecine et certains députés de l’UMP et relayés par un type de presse (Valeurs actuelles pour ne pas les nommer).
Le Réseau Européen de Réduction des risques et des dommages vient de publier trois nouveaux rapports (en anglais) sur les SCMR qui viennent s’ajouter à la littérature déjà exitante.
Drug Consumption Rooms in Europe, Organisational overview
Sara Woods, Drug Consumption Rooms in Europe, Organisational overview, European Harm Reduction Network, 2014.
Ce rapport donne un apperçu des services fournis, de l’organisation et des méthodes de travail auprès de 39 SCMR dans sept pays européens (Danemark, Allemagne, Grèce, Luxembourg, Norvège, Espagne et Suisse). Les résultats des enquêtes ont été compilés avec ceux d’une enquête menée en 2010 auprès de 30 SCMR des Pays-Bas.
 
 
Drug Consumption Rooms in Europe, Client experience survey in Amsterdam and RotterdamJennifer Peace, Drug Consumption Rooms in Europe, Client experience survey in Amsterdam and Rotterdam, European Harm Reduction Network, 2014.
Ce rapport de synthèse présente les résultats d’une enquête auprès de 101 utilisateurs de quatre SCMR des Pays-Bas. L’enquête met l’accent sur la santé des utilisateurs et les attributs de bien-être. Le but de cette étude est d’établir un outil de collecte de données standardisées, qui permettra d’améliorer les rapports et l’analyse de données à l’avenir.
 
 
 
Drug Consumption Rooms in Europe, Models, best practice and challengesDirk Schäffer, Heino Stöver, Leon Weichert, Drug Consumption Rooms in Europe, Models, best practice and challenges, European Harm Reduction Network, 2014.
Ce rapport présente les différents modèles de SCMR, les bonnes pratiques professionnelles et les défis à venir.
 
 
 
 
Une expérimentation française d’un dispositif qui à 30 ans d’existance
Les premiers exemples de lieu d’accueil avec espaces de consommation, fonctionnant sur une base officiel ou semi-officiel, remontent aux années 1970 aux Pays-Bas (‘Prinsenhof’ et ‘HUK Amsterdam’) et au début des années 1980 en Suisse (‘Fixerraum-Experiment’ au AJZ à Zurich). Ces initiatives étaient fondamentalement différentes des SCMR d’aujourd’hui : la supervision de la consommation ou la distribution de matériel de réduction des risques n’était pas l’objectif principal. Ces espaces étaient des lieux « protégés » pour la consommation de drogues et permettaient aux professionnels d’entrer en contact avec des personnes qui utilisent des drogues. Ces initiatives expérimentales ont été arrêtées après une période relativement courte, soit par les organismes ou après l’intervention de la police.
Dans les années 80, la propagation du VIH / SIDA, l’augmentation significative des décès liés à la consommation de drogues et l’augmentation du nombre des scènes ouvertes dans un certain nombre de villes européennes, marque l’échec des politiques des drogues basées exclusivement sur l’abstinence et la répression (par exemple la cure de désintoxication, la réhabilitation sans drogue ou l’emprisonnement). C’est à cette période qu’a commencé à émerger les approches de réduction des risques et des dommages telles que les programmes d’échange de seringues et les traitements de substitution aux opiacés.
La première SCMR, dans lesens moderne, a ouverte en 1986 à Berne en Suisse.
 
 
Un des maillon de l’approche de réduction des risques et des dommages
Les SCMR n’ont pas prétention de régler à elles seules le problème de la drogue dans notre société. Elles sont un des maillon de l’approche de réduction des risques et des dommages qui, elle-même est un des outils de notre politique des drogues. C’est une démarche de santé collective visant, plutôt que l’élimination de l’usage des psychotropes (ou d’autres comportements à risque ou «addictifs»), à ce que les principaux intéressés puissent développer des moyens de réduire les conséquences négatives liées à leurs comportements et aux effets pervers des contrôles sur ces comportements, pour eux-mêmes, leur entourage et la société, aux plans sanitaire, économique et social. Les SCMR sont des centres dans lesquels les consomateurs de drogues confirmés sont autorisés à consommer leurs drogues dans de bonnes conditions d’hygiène, sous la surveillance d’un personnel qualifié et sans la crainte de l’arrestation. Elles ont pour objectifs de :

  1. Réduire les problèmes de Santé pouvant découler de la consommation de drogues:

– Réduire le nombre d’overdoses mortelles ;
– Réduire les risques liés aux contaminations par les virus de l’hépatite C, du VIH et autres infections transmissibles par le sang ;
– Réduire le développement d’abcès, infections et d’autres problèmes de santé pouvant résulter de la consommation de drogues lorsque celle-ci se déroule dans un cadre non-hygiénique (cage d’escalier, entrée d’immeuble, squats, toilettes publiques, camions, square…).

  1. Réduire les nuisances associées à l’usage de drogues dans les lieux publics et semi-publics:

– Réduction de l’usage de drogues dans les lieux publics et semi-publics ;
– Réduction du nombre de seringues usagées jetées dans l’environnement.

  1. Améliorer l’accès aux services socio-sanitaires et thérapeutiques chez les consommateurs de drogues les plus marginalisés :

Il s’agit d’améliorer l’accès aux soins et plus particulièrement l’accès aux traitements de substitution et au sevrage et de toucher les consommateurs qui n’utilisent pas les services socio-sanitaires et/ou thérapeutiques. Mais aussi de promouvoir l’accès aux dépistages et bilans sanguins, dans l’idée qu’un système veineux préservé amène la personne à se faire dépister plus régulièrement car moins de douleurs.

  1. Promouvoir l’éducation aux risques liés à l’usage de drogues:

Les SCMR permettent une éducation et une information sur les pratiques à moindre risque « in vivo » au moment de la consommation. Essentielle, cette éducation est adaptée à l’observation des pratiques des personnes, contrairement aux messages diffusés actuellement dans les CAARUD qui ne peuvent pas prendre en compte les situations de précarité où les usagers s’injectent leur drogue ou traitement de substitution par ex dans des conditions d’hygiène impropres.

  1. Réduire les coûts des services de Santé liés à la consommation de drogues:

L’instauration de SCMR offre un rapport coût-efficacité avantageux qui doit inciter les décideurs politiques à l’action : Outre la perte tragique et coûteuse de vies humaines, certains méfaits pourraient être évités ou atténués. Ceci entraînerait des bénéfices en terme d’économie de la Santé (traitement pour maladies chroniques, services d’urgence…) à l’instar des programmes d’échange de seringues pour limiter la propagation du VIH. Les coûts d’application de lois répressives de lutte contre la délinquance et des addictions peuvent être également diminués : ces ressources pourraient alors être consacrées à la prévention, aux traitements et aux soins de Santé.
 
 
« Salles de consommation à moindre risque » ou « salles de shoot » ?
Le terme de « salles de consommation à moindre risques » de drogues est souvent utilisé de manière interchangeable avec « centres d’injection, de consommation (médicalement) supervisée » et « salles de shoot ». Cependant, il est important de souligner que les « salles de shoot » ne peuvent pas être considérées comme la même chose, car il n’y a pas d’espace hygiénique pour la consommation, ni de professionnelles pour la superviser. De plus le « shoot » fait référence à l’injection alors que les SCMR permettent également aux consommateurs de drogues d’inhaler.
 
 
Un débat dépassant nos frontières
Il y a 90 SCMR officielles dans le monde dont 87 en Europe : 13 en Suisse, 30 au Pays-Bas, 24 en Allemagne, 13 en Espagne, 1 au Luxembourg, 1 en Norvège, 5 au Danemark, 1 en Australie et 2 au Canada. Il existe des évaluations scientifiques pour la plupart des SCMR européennes et celles d’Australie (Sydney MSIC) et du Canada (Insite et Dr PeterAIDS Foundation) ont fait l’objet d’évaluation scientifiques à grande échelle.
Ces différentes expériences réussies ont stimulé des débats dans un certain nombre d’autres pays comme le Portugal, la France, la Belgique, la Grande-Bretagne, l’Irlande, l’Autriche, la Hongrie, l’Italie, la Slovénie, la Roumanie, l’Islande, les USA mais aussi dans certaines autres villes de pays disposant déjà de SCMR comme Yarra en Australie ; Ottawa, Toronto, Victoria, Québec et Montréal au Canada où des groupes de militants, de professionnels, de scientifiques, de personnalités politiques et de la société civile ont été mis en place pour défendre la mise en place de SCMR dans leur pays.
 
 
Le vrai du faux sur des fermetures de SCMR
Certaines SCMR ont fermées leurs portes pour diverses raisons, mais la majorité parce que le contexte local des besoins et la scène de la drogue ont changé (pour exemple, aux Pays-Bas où certaines SCMR avaient pour cible les consommateurs de drogues sans-abris, la baisse de la demande liée à la baisse du nombre de sans-abri chez les consommateurs de drogues à conduit à la fermeture de plusieurs installation (adaptation du dispositif). En Slovénie, la SCMR gérée par l’association ‘Društvo AREAL’ qui a fonctionné de 2004 à 2008, a fermé pour des raisons politiques et en septembre 2014 la SCMR d’Athène en Grèce géré par l’association ΟΚΑΝΑ a fermé provisoirement après une année de fonctionnement, en attendant sa légalisation par le parlement.
 
 
Des SCMR gérées par des associations d’auto-support
Une expérience a eu lieu en 1994 à Montpellier en France, gérée par l’association d’auto-support ASUD. L’association mettait à disposition un espace de consommation aux usagers de drogues pour y consommer non pas des substances interdites, mais uniquement des médicaments prescrits par des médecins, la rendant ainsi ni légale, ni illégale. L’expérience tourne court au bout de quelques mois à cause d’une overdose non mortelle, celle d’une jeune femme dont on découvrira ensuite qu’elle était mineure. Une deuxième expérience s’est déroulée à Vancouver au Canada juste avant l’ouverture de la SCMR autorisée ‘Insite’ en 2003. La lenteur de la procédure pour opérationnalisé ‘Insite’ a été le motif d’ouverture, par une association d’usagers de drogues (VANDU), d’ouvrir un espace de consommation. Celui-ci est resté ouvert 181 jours. Le lieu était supervisé par des professionnels de la santé (infirmiers et médecins), les pairs organisaient et animaient l’espace. VANDU a continué par la suite, et ceux jusqu’en 2014, à proposer un espace de consommation supervisée.
 
 
Des SCMR adaptées aux besoins
Il existe trois types de modèle de SCMR : intégré, spécialisé et mobile.
– Le modèle intégré :
Les SCMR intégrées sont les plus courantes. Ces SCMR sont principalement intégrées dans des centres d’acceuil, de réduction des risques et des dommages à côté d’une gamme plus large de services, tels que le conseil et le dépistage du VIH et des hépatites, la prévention des overdoses, des programmes d’échange de seringues, la prise en charge psycho-sociale, les soins de premier recours, l’accès aux traitements de substitution aux opiacés et aux programmes de réinsertion sociale.
– Le modèle spécialisé :
Les SCMR spécialisées sont située à proximité immédiate de toute une gamme d’autres services de la drogue et situées près des scènes ouvertes de drogues.
Le modèle mobile :
Les scènes de la drogue étant mobiles, il est parfois nécessaire de mettre en place un dispositif mobile afin de répondre aux besoins des consommateurs de drogues. Ce dispositif est également une option plus acceptable socialement qu’un dispositif intégré ou spécialisé. Les SCMR mobiles (fougonnettes aménégées avec 1 à 3 places d’injection supervisées) existent dans seulement trois pays européens : l’Espagne (Barcelone), l’Allemagne (Berlin) et le Danemark (Copenhague). Elles offrent une gamme de services de réduction des risques et des dommages (échange de seringues, dépistage du VIH et des hépatites et l’orientation vers d’autres services médio-psycho-social.
 
A suivre…
 
Texte complet ici
 
Pour plus d’information sur les SCMR